mercredi 27 décembre 2006

Pierre L., abbé des cent lotis

L'aventurier qui se pelote sur ce banc public, c'est un insurgé. Son créneau, c'est la fracture fiscale. C'est trop facile, à la fin, de gagner la sympathie des électeurs avec des causes voyantes. Pierre L. défend bruyamment une minorité silencieuse : les surimposés. En France, leur vie quotidienne est un calvaire, étouffé par un black out médiatique genre pensée unique. Leurs mouvements de ronds sont traqués par une pieuvre stalinienne qui éreinte leurs experts compteurs. Pour survivre, les surimposés doivent s'expatrier vers Monaco ou Saint Barthélémy pour conserver un peu de cette bonne argent gagnée à la sueur de leurs fonds. Ils ruminent leurs frustrations en attendant les soldes de Gucci et contentent leurs enfants avec des glaces moyennes. Il leur faut parfois tourner des publicités ridicules pour boucler les fins d'années, malgré le risque de surexposition.
En plus, c'est mauvais pour l'emploi des non-imposables, l'essorage fiscal du surimposé. C'est logique, ça. Le B.A ba de l'abbé des cent lotis. Un riche ça y en a créer de la richesse. La richesse ça y en a permettre aux riches d'acheter beaucoup de travail aux pauvres. Les pauvres, si ça y en a bien travailler, ça y en a pouvoir devenir riche, aussi. Donc le riche ça y en a créer de la richesse pour le pauvre, au fond.
"Là où l'on serre la ceinture les plus riches, on étrangle les plus pauvres", c'est le refrain vibrant des Lellouchistes. Assoiffés de justice fiscale, ils ont commis plusieurs pétitions pétaradantes et mijotent des émeutes hautaines place des vosges. Pour contribuer à la généreuse lutte, le radical mou propose une réduction de l'ISF à l'abonné capable de publier sur ce site des clichés inédits de la manifestation.

samedi 23 décembre 2006

Noël impair

C'est le premier Noël sans maman. J'aime me faire croire que je suis dé-ritualisé, tout plein de recul face aux opérations de joie programmée, et pourtant je mâchonne un arrière-goût d'orphelinat depuis début décembre. Je me surprends à lécher pour elle des vitrines virtuelles, à astiquer la collection d'après rasage qu'elle complétait tous les ans et à lui acheter deux bouteilles de champagne sans migraine. Hier, j'ai ressorti l'autobiographie de Canetti qu'elle m'avait offerte il y a au moins quatre ans et que je n'avais toujours pas pris le temps de lire. Les généreux ne meurent jamais. On fait tous un peu semblant de faire comme si de rien n'était, on sort les impers de Noël et on s'administre préventivement des anti-dépresseurs. Clément a enseigné à Awen et Timothé l'art des caricatures de l'avent. Laury a décoré l'épicéa sans boule dans la gorge. Gilles dit que cette année on fête Léon. Jeanne roule ses premières truffes de nez. Audrey regarde le foot avec moi et fait même un peu semblant de s'y intéresser. La solution, c'est de se gâter-nourrir.
Quel cadeau mystique pour ma mère athée? Une confiture d'anges amers.

jeudi 21 décembre 2006

L'extrême droite plurielle

La voilà, la première leçon de démocratie de la campagne 2007 en direction de l'UMPS. On serre les coudes à total tribord. Il ne manque plus que le nobliaud du Puy du Fou et la fête à la défaite pourra commencer. C'est vrai qu'à droite de Pasqua il y a une telle créativité idéologique qu'il fallait d'urgence ranger les pions sur l'échiquier : négationnistes têtus, poujadistes de proximité, néo-nazis camouflés, patriotes énervés, nationalistes anonymes, nihilistes affamés, militaristes en retraite, royalistes démagogiques, fascistes tricolores, coopératives des autoritaristes, collectionneurs de timbres coloniaux, antisémitistes visibles, vichystes nostalgiques, petits blancs consanguins, j'en passe tant ça pullule derrière Jeanne D'arc qui préfère partir en fumée. C'est un peu trop facile de brûler leurs images d'Epinal et cela fait perdre un temps fou, alors soulignons plutôt les leçons pédagogiques offertes par cette grande voiture balais du tour de France des idées.
Leçon épistémologique : le nationaliste n'aime pas l'histoire, c'est bon à savoir pour les enfants de tous les pays, comme dirait Enrico.
Leçon idéologique : si l'extrême droite est une droite décomplexée, la droite est une extrême droite complexée.
Leçon électorale : comme trois électeurs du front sur quatre votent ainsi pour faire chier les autres, c'est que les autres les font chier. Apprenons leur le bulletin blanc, qui est un meilleur caniveau les jours de scrutin. Ou alors, votons pour un mort : Coluche, Gandhi, Bourdieu ou Vian.
Leçon proportionnelle compliquée : si l'éclatement de l'aile gauche de la gauche est une machine à faire gagner la droite, la réunification de l'extrême droite est un stratagème visant à faire triompher l'aile centriste de la gauche. Comme il n'y a pas d'aile au centre, les votes s'envolent. (Se reporter aux articles "une malchance pour l'égalité" ; "les rois de la gauche" ; "rupture tranquille" pour approfondir l'incompréhension de ces phénomènes)
Leçon statistique : l'opinion publique n'existe pas, les instituts de sondage non plus. Il vaut mieux jouer au loto.
Leçon héraldique : bah oui c'est moche, un drapeau.
Leçon éthico-sociologique : lorsque les élites pensent et agissent comme des porcs, les électeurs votent comme des cochons.
Moralité démocratique : quand les ploutocrates jouent les méritocrates, le peuple fait semblant d'être populiste.

mardi 19 décembre 2006

Nombril Narcisse, mannequin en crampons

Il est beau comme un ballon neuf, Djibril C. Adepte du football total, il met son corps à l'épreuve pour faire peur au stoppeur et envoûter la femme du libéro. Physiquement, c'est l'antithèse de Guy Roux, mais pour le business, c'est son fils spirituel. Il change de scalp toutes les semaines pour perturber le marquage individuel. Du côté des futurs adversaires, on programme toute la semaine un Argentin hargneux pour marquer à la culotte le grand noir aux cheveux rouges et le défenseur en question voit arriver un grand blond tatoué avec une barbe bleue. Le temps de la traduction, Djibril a déjà troué les filets...
J'aime pas trop son jeu. C'est vrai qu'il claque des buts fabuleux mais il donne toujours l'impression d'appliquer méthodiquement la formule de Vieiri : "le football est un sport individuel qui se joue à plusieurs". Il a déconné avec ses piercings au tibia, tout le monde l'avait prévenu que ça pouvait le fragiliser. On dit qu'il préfère le foot en hiver. Apprêté comme un patineur artistique, Djibril C. aime contempler son reflet sur les gazons gelés. Ce n'est pas un bon joueur de couloir, il a trop la tête dans le miroir. Du côté de la Canebière, on dit qu'il vaut mieux l'avoir en poster qu'en partenaire.

lundi 18 décembre 2006

Bataille et Fontaine, psychologues de masse

Bataille et Fontaine, c'est comme les frères Bogdanoff, je n'arrive jamais à me souvenir qui est Igschka et qui est Grigor. C'est le syndrome Dupont et Dupond, ça, on sait tous qu'il y a une différence dans le bourlet de la moustache mais on n'arrive pas à l'associer à la bonne terminaison. Tout cela renvoie à un dysfonctionnement profond dans la perception sociale de la gémellité, mais cela ne gênera en rien mon propos.
Ce qu'il y a d'admirable, chez Bataille et Fontaine, c'est que malgré TF1, ils assument vraiment une mission de service public, à la manière de Julien Courbet qui fourgue des avocats gratis aux braves gens englués dans des intrigues juridico-financières injustes. Leur boulevard à eux, c'est le vide laissé par Jacques Pradel et Françoise Dolto. Rabibocher les perdus de vue, réunir ceux qui ne s'aiment plus, rendre son X à l'orphelin. Il y a toujours un rideau entre les deux pièces du puzzle parce que TF1 a toujours préféré l'érotisme à la pornographie, c'est historique. Le petit gros en costard gris, il est hyper doué pour la larme à l'oeil, c'est Dechavanne qui lui a monté un système d'irrigation dans la lentille de contact. Le grand avec la permanente, on a toujours peur qu'il finisse par proposer un contrat d'assurance vie avant la page de pub, mais il se retient.
Y a que l'intimité qui se montre, c'est quand même vraiment émouvant. Déjà, c'est osé, sur TF1, de montrer brut de brut qu'il n'y a pas que les stars qui souffrent au niveau du réel. C'est du documentaire ethnographique sur un canal commercial. C'est prendre un risque énorme avec l'audimètre et la culture de la chaîne, si vous me passez le pléonasme. Vous me direz que la star academy a déjà introduit les cas soc' à l'antenne et je vous répondrai "oui, mais avec des paillettes". Tandis que chez Bataille et Fontaine, les gens d'en bas sont dans leur milieu naturel, sans coach, sans prompteur, sans filet. Plus vrais que nature. Xavier qui veut demander pardon à Stéphanie de l'avoir trompée avec sa petite soeur pendant qu'elle se faisait opérer des amygdales, je veux dire, ça ne s'invente pas, c'est du vécu. Alors bien sûr, je les entends déjà, les bobos qui grincent, genre c'est populiste, démagogique, voyeuriste et tout. C'est télé-alarmiste, ça comme argument, un point c'est tout. Tout le monde sait très bien que ce n'est pas de leur faute, à Bataille et Fontaine, si les gens d'en bas demandent ça.
Imaginez une seconde tous ceux qui ont fauté avec leur belle soeur. La cas de Xavier, c'est un petit morceau de résilience pour tout le monde. Ah ça, c'est sûr que ça n'intéresse pas les bourgeois bohèmes qui peuvent se payer des psys à 90 euros de l'heure. Ils rétorqueront que le paiement participe à la guérison? Bataille et Fontaine peuvent facturer tout le monde par SMS. Parce qu'au fond, y a pas photo, c'est le geste qui compte.

dimanche 17 décembre 2006

Bernard T., Saint qui touche

On lui donnerait Bourdieu sans confession. En voilà un qui n'est pas un héritier. Bernard T., c'est le Frison Roche de l'Everest social. C'est pour cette raison que les fils d'énarques cherchent à l'abattre. Une tripotée de jaloux. Je vous jure, monsieur le Juge. Tout ce qu'il a racheté pour un franc symbolique, c'est le symbole qu'il faut retenir, pas le franc. Le match payant de Marseille contre Valenciennes, c'était pas vraiment de la corruption, c'était pour protéger l'intégrité physique des joueurs. Les vilains scribouillards, gauchistes comme des fils de notables, qui font croire qu'il a beaucoup licencié, ce sont des manichéens amnésiques. Son vrai but, à Bernard, c'était d'en sauver, des emplois. D'ailleurs, en termes de propriété intellectuelle, il fût le créateur d'un argument à l'efficacité éprouvée. Maintenant dans le langage du management, on ne dit plus "plan de licenciement", on dit "plan de sauvegarde de l'emploi". C'est plus joli et ça rime bien dans un curriculum vidé. C'est un précurseur, Bernard T.
Il est polyvalent. Il aime raconter qu'il a démarré sa carrière d'assistant social en vendant des télévisions à crédit. Trop forte, la stratégie marketing. Il inoculait la dépendance cathodique aux ouvriers des 30 glorieuses en leur demandant de se gaver d'ondes pendant une semaine et de noter leurs réflexions sur un petit carnet offert par la maison. Il prêtait l'écran en échange. Une semaine plus tard, il revenait avec une offre de crédit. Et ça marchait à tous les coups. Marcof et Thierry A. adorent quand oncle Bernard narre ses vieilles histoires. Le clou de la comptine autobiographique, c'est quand il raconte que ces ouvriers accrocs avaient pris l'affaire au sérieux et avaient méticuleusement consigné leurs critiques sur le petit carnet. Généralement, Thierry et Marcof demandent au public de ricaner et Bernard jette un regard amoureux à son reflet, dans ses chevalières. Il faudrait publier tout cela, dit toujours l'homme politique sans cravate qui siège à ses côtés, voulant grignoter quelques points d'applaudimètre que Bernard lui concède élégamment.
Le plus émouvant chez lui, c'est sa gestion de la pudeur au niveau de toutes les souffrances qu'il a endurées. C'est pas chez les bourgeois que t'apprends ça. Il a toujours su rebondir et c'est ce qui le rend encore beau, Bernard. Chanteur, vendeur, entrepreneur, présentateur, directeur, ministre, acteur, il sait tout faire. C'est un renard sur toutes les surfaces.

vendredi 15 décembre 2006

Quelque chose à nous en Helvétie

Quand il a entamé des démarches afin d'obtenir la nationalité aux services de l'Etat civil de la municipalité de Saint Barthélémy, la secrétaire lui a demandé en rigolant : "vous êtes Belge ou quoi ?". Alors Johnny H. s'est mis à réfléchir. Son père l'était, Belge, c'est vrai, alors pourquoi pas lui ? Johnny H. est exténué par l'impôt soviétique qui ponctionne injustement les moyennes fortunes de France. Avec l'euro, son coach de stretching dermatologique a doublé ses tarifs. Il faut se payer des mois d'avocat dès qu'on rigole un peu avec une petite sur le yacht. Pas moyen d'importer non plus des plombiers polonais pour terminer sa villa à Saint Barth. Et puis tous ces salauds de pauvres qui le téléchargent gratis. Le stade de France est trop petit pour amortir les frais de maquilleuses et de pédicures.
La nationalité belge, ça n'a pas marché non plus. Avec le temps, il y a prescription. C'est Nicolas S. qui l'a finalement convaincu quand il a dit que la France si on l'aime on y reste et sinon on la quitte. Et bien, il ne l'aime plus, ce pays où l'on sous-tire l'argent aux anciens cons co-belges pour le donner aux franco-congolais. Il aurait bien rejoint Florent P. en Argentine, parce que le nom du pays est accueillant et qu'il pourrait faire escale à Saint Barth afin de résoudre enfin cette obscure affaire de nationalité. Mais cet été, alors que Johnny s'apprêtait à échanger son sang contre l'hémoglobine détaxée d'un jeune Sénégalais pétant de santé, il croisa Yannick N. dans la salle d'attente. Yannick lui confia ses problèmes de jeune retraité du Tennis et lui indiqua avec des dents longues comme le bonheur que l'espérance de fric des nouveaux Suisses dépassait d'une douzaine d'années monétaires celle des habitants de l'Europe trotskiste. Alors Johnny décida en bloc d'y installer ses lingots. Comme dirait Patrick D., ce sont toujours les meilleurs qui s'en vont.

jeudi 14 décembre 2006

Une malchance pour l'égalité

Azouz B., à le voir sourire comme ça, il est bon comme dans ses romans et vraiment c'est un modèle d'intégration de la République méritocratique. Il fait partie des gentils, au gouvernement, avec Jean Louis B. C'est tout à fait un truc à la Chirac, ça : les synthèses entre la droite réactionnaire et les nihilistes arrivistes, libéraux quand même. Azouz, c'est pour montrer que la gauche n'a pas le monopole du coeur. Alors il est sous-ministre à l'égalité des chances. Sous-ministre, parce qu' il faut y aller doucement avec l'aile droite de la synthèse. A l'égalité, mais des chances seulement, pour la même raison. Son chef, Jean Louis B., il dit que la cohésion sociale, c'est son boulot. Lui aussi, il est de la droite gentille. Un qui remonte les manches pour les pauvres, comme Azouz B.
Alors bon, c'est vrai que leur problème à eux, c'est qu'on les entend peu. L'autre problème, c'est que les rares fois où on les entend, on ne les comprend pas. Mais c'est souvent comme ça, les médiateurs. Le plus drôle, c'est quand on leur fait commenter les prises de position de Nicolas S. Nicolas S., ça se voit qu'il n'aime pas tous les pauvres, quand même. Les seuls pauvres qu'il aime, c'est ceux qui ne le restent pas. Ceux qui courent sur l'escalator social avec une inextinguible soif de réussite. Jean Louis B., lui, il doit construire de nouveaux poulaillers urbains pour la moitié de tous les pauvres et Azouz B., il anime la star academy de l'insertion diversifiée. Normalement, ils préparent le bilan social de Chirac II. Alors, quand ils se font filmer les manches remontées sur le terrain, il ne faudrait pas que Nicolas S. leur pourrisse l'ambiance à l'avance, soyons logiques. Et pourtant, le gros sabot de la place Beauvau ne cesse de mettre la zizanie dans leur délicate entreprise. Il a même été jusqu'à inventer une espèce de téléréalité policière de proximité, rediffusée régulièrement dans le droit de t'avoir, pour ruiner toutes leurs tentatives. Les pieds dans le plat de la cohésion sociale, la petite brute fait de la destruction-reconstruction d'adolescents, de jeunes flics et de pompiers des banlieues pour foutre le feu à l'opération de ravalement urbain. Si bien que personne ne parle d'Azouz B. et de Jean Louis B. Même moi, je ne sais pas trop quoi en dire.

Laurent B., caillasseur d'ambulances

Je ne sais pas si vous avez remarqué, mais ils ont bouleversé tous les programmes cet été. Ils ont fait le coup lâchement, au mois d'août, pendant qu'on bronzait avec nos sudokus. Comme les députés, en traîtres. On a le dos tourné au soleil, et vlan, ils nous suppriment l'impertinence des grilles hebdomadaires, discrètement, pour éviter les manifs de téléspectateurs.
Par exemple, moi, tout le monde s'en gave, c'était ma petite bouffée d'insolence dans ce PAF formaté. Laurent B., il était trop fort. J'adore comme il vanne. Trop puissant, l'amuseur, rien ne pouvait l'arrêter dans son délire. Même Thierry A., le présentateur de l'émission, il ne pouvait pas s'empêcher de pouffer. Une fois, il y avait Elisa Yapjörg, une top model danoise qui parlait pas bien le français mais qui présentait un décolleté ouvert sur des seins bombés. Carrément, laurent B., il lui a sorti : "j'irai bien faire un tour dans ta silicone vallée". T'as vu comment il gaze Gaffie ? Moi, ça me rappelait mon pote Jérôme quand on avait fait le voyage linguistique en Allemagne. Il parlait aux Allemands avec une voix toute douce et en fait il les insultait. Mais en français, tu vois, comme ça, ils comprenaient pas, les boches. J'adore ce genre d'humour, tu sais, quand le comique prend des risques.
Bref, nous étions morts de rire, Thierry et moi, et comme ce soir là, j'avais rien sous la main pour enregistrer, Thierry a promis qu'il la repasserait au best of la semaine suivante. C'était vraiment bien organisé, au niveau de l'impertinence, cette émission. Laurent B., c'est un comique qui nous rappelle que le rire a une fonction politique dans la société, tu vois. Par exemple, quand Thierry invitait une femme politique, Laurent il y allait à fond. Carrément, déjà, il tutoyait Christine Boutin. Genre : "t'as pas un morceau de shit à dépanner, Christine?". Alors là, t'imagines le malaise... et la quinte de rire pour Thierry et moi. En plus, ce que j'aimais bien, chez lui, c'est que quand même, il avait des limites. Par exemple, quand il y avait Joey Star ou Bernard Tapie sur le plateau, Gaffie il savait faire preuve de retenue parce qu'il savait qu' ils avaient des problèmes avec la justice. Alors il ne voulait pas en rajouter, tout simplement. J'aime bien les humoristes élégants, moi. En revanche, il était impitoyable avec les amuseurs ratés. Qu'est ce qu'ils ont pris, Michel Leeb et Laurent Gerra, avec lui!
Et puis il maniait le second degré, Laurent B., avec brio, en plus. Il a fait un film, les clefs de bagnole, j'ai même pas eu besoin d'aller le voir tellement l'affiche, rien que ça, ça m'a fait rire. En fait, dans le sous titre, carrément, il avait fait écrire "n'y allez pas, c'est une merde". Enorme. Je me suis dit, c'est pas possible, déjà l'affiche elle m'explose à gorge déployée, alors si je vais le voir, je risque l'arrêt cardiaque. Tu vois, c'est à ça que je reconnais les grands humoristes : ils sont capables de pratiquer l'auto-dérision. Son film, je l'achèterai en DVD. Pour le regarder à petites doses.

mardi 12 décembre 2006

Je suis devenu un vieux jeune

"Virgin mobile, soyez enfin détendu du mobile"
Moi, quand je vois des publicités comme celle là, c'est le coup de vieux. Je me remets en question. Un profond sentiment de ringardise m'envahit. La cruelle prise de conscience que je suis tendu, que dis-je, carrément coincé du mobile. Qu'en pense Laury? Cela fait au moins 10 ans que nous faisons l'amour sans SMS. La honte pour moi. Je n'y ai même pas pensé. Pire : je ne lui ai jamais proposée d'inviter une copine qui soit chez Orange, comme nous. Je suis vraiment bidon. On pourrait s'envoyer des SMS coquins tous les trois sur une couverture poilue, nous aussi. Après, je me dis que physiquement, il faut assumer. Pour atteindre Doc G., il faut bosser plusieurs mois, sans relâche : macdo au petit déjeuner, KFC à midi, dîner chez Quick. Se laver les dents à la sauce potatoe entre chaque repas. Et puis, je suis hanté par mes complexes de mobile. Le mien date de 2003. Le Paléolithique. A l'époque, il fallait de gros téléphones pour que les ondes archaïques traversent les murs de la grotte. Il faudra que je parle de tout cela à ma sexologue.
Fasciné par le spot, j'ai fait des recherches sur le réalisateur génial de cette pub et alors là, je cite, parce que sinon, vous ne voudrez jamais me croire : «Nous recherchions une personnalité capable d’illustrer notre positionnement «Détendu du mobile» : Virgin Mobile est une marque pleine d’humour, sans a priori. Nous tenions par ailleurs à inscrire cette publicité et cette personnalité dans un univers fun et glamour, correspondant au territoire d’expression de notre marque» explique Julien Allisy, Directeur Marketing et Communication de Virgin Mobile. Les spots publicitaires, tournés par Eric Toledano et Olivier Nakache, mettent en scène 2 scenari où Doc Gynéco – qui signe ici sa première apparition dans une publicité – communique sans limite par SMS avec ses deux superbes masseuses pour leur donner ses instructions : second degré, humour, impertinence sont au rendez-vous !
Alors là, j'ai senti la pression. Déjà, je sais même pas ce que ça veut dire, moi, "territoire d'expression". Et puis je suis incapable de déceler l'humour, l'impertinence et le second degré. La honte sur moi. J'ai bêtement cru que c'était un truc sexiste classique, moi, le massage détendu du mobile, genre la playmate de collarococoricocoboy pour les jeunes d'aujourd'hui. Et là j'apprends que ça va beaucoup plus loin que ce que j'avais perçu. Et je reprends une nouvelle claque au niveau du décalage générationnel.
Le constat est sévère : à 33 ans, j'arrive même plus à saisir l'impertinence et le second degré dans l'univers fun et glamour des publicitaires adophiles.

samedi 9 décembre 2006

Pascal S, démographe crétin

J'apprends ce matin que Pascal S., chanteur du dimanche matin, est à la démographie ce que Georges F. est au journalisme sportif : un des meilleurs analystes internationaux. Pour briller en société, il faut citer ce poète : "la bite des noirs est responsable de la famine en Afrique". Le cliché était déjà connu et ressassé mais je ne l'avais jamais entendu avec autant de violence et de vulgarité.
Ce qui me semble révoltant, c'est la succession récente de propos au mieux ethnocentriques ou assimilationnistes, au pire clairement racistes, beuglés avec l'assurance du bon sens, grossièrement justifiés de la manière suivante : à les entendre, ils ne font que parler vrai au nom de ce que sont censés penser vraiment les vrais gens. Ainsi Georges F., a réinventé les sous-hommes et revendiqué une représentativité de couleur pour les footballeurs de haut niveau. Entre parenthèse mais en gras, quand Georges F. a fait pire en trente secondes que Thierry Roland en trente ans, un courageux leader du PS a dénoncé avec vigueur les propos de son camarade : "les propos de Georges frôlent le racisme"... De son côté, Nicolas S. ne cesse de prôner sans complexe le nettoyage des banlieues fondé sur la théo-connerie de la pomme pourrie dans le compotier des quartiers dits sensibles et explique à qui veut l'entendre que les émeutes de banlieue sont dues à la polygamie. Nous lui offrons à ce titre le diplôme d'ethno-sensationnalisme oral. Il faut dire que Pascal B. nous avait déjà révélé que la cause principale de la fracture coloniale, c'est la culpabilité actuelle des habitants des anciens pays colonisateurs et leurs sanglots cons comme des violons. Ragaillardie par tous ces réactionnaires décomplexés, l'équipe de Marcof s'autorisa donc à composer un SMS très subtil sur "l'odeur des noirs" pour se venger noblement du fin sketch de Dieudonné.
Mais ce qui me semble réjouissant, c'est que lorqu'ils s'expriment ainsi, ces réactionnaires bavards, comme s'ils partageaient avec les auditeurs la complicité d'une fin de soirée trop arrosée, on les prend la main dans le sac : les deux hémisphères enfermés dans la boîte à stéréotypes. Quand Pascal S. laisse échapper ses pensées profondes sur la famine et la démographie dans le langage de la bite à Dudule, il nous montre -avec une sincérité désarmante- qu'il pense comme un pénis.

vendredi 8 décembre 2006

Les rois de la gauche

Je les sens bien repartis pour nous refaire le coup de la foire du trône. Ils ont tous tellement compris la leçon de 2002 qu'ils aspirent désormais au comique de répétition. Du fait de leurs efforts convergents, ils permettent à la droite de sortir du piège mitterrandien, l'instrumentalisation géniale des scores du FN. C'est pas juste si la droite perd à chaque fois à cause du poujadiste, se sont-ils dit. Morcelons nous un maximum, ce sera plus équitable! C'est la loi de l'égalité des chances appliquée aux élections. Ou alors, c'est une idée fumante pour redonner aux citoyens le goût de la politique. Transformons le premier tour des présidentielles en législatives proportionnelles foireuses, car il faut de l'humour pour lutter contre l'abstentionnisme. Ne cherchons ni convictions communes ni le moindre élément d'unité, ce n'est pas drôle. Que les plus gauchistes d'entre nous envoient toutes leurs églises et qu'elles s'entre-déchirent, mais qu'elles se rassemblent dans la critique radicale du socialisme mollasson. Que le PS unifié en façade méprise tout le monde à babord en continuant néanmoins à s'adresser inaudiblement aux classes populaires. Et que le PC danse énergiquement le cul entre ces deux chaises ! Qu'est ce qu'on va se marrer !
Mais peut être que derrière les apparences, tout cela va beaucoup plus loin qu'un opéra comique. Peut être est-ce une stratégie commune très fine, une tactique électorale machiavélique issue d'un raisonnement collectif. Un protocole secret pour une construction à long terme : pour battre la droite la plus bête du monde, devenons d'abord la gauche la plus stupide de l'histoire. L'important c'est de participer.

Générosité ostentatoire

Le téléthon, c'est comme les pièces jaunes, ça m'énerve. Pourtant, les myopathes ne m'ont jamais rien fait de mal et je n'ai rien contre la générosité en général. C'est la mise en scène, les records débiles, le tourniquet à promesses de fric, toute cette charitable bien-pensance et politiquement hyper correcte qui me donne le tournis. Jamais je ne leur lâcherai un centime.
Le téléthon, c'est comme les pièces jaunes, c'est la solidarité façon fondation Mac Donald. C'est de la grosse générosité bien voyante pour donner bonne conscience. C'est Christian Clavier qui vient faire applaudir sa carte american express entre deux photos people avec Sarkozy. C'est Afflelou et toute sa bande qui veulent nous faire croire qu'ils sont fous. C'est du pain béni pour les ringards en manque de come-back. C'est Jean Pierre Foucault qui propose d'animer bénévolement une soirée de qui veut gagner des millions. C'est un défilé de calculatrices à pattes qui veulent des projecteurs qui montrent leurs coeurs sur leurs mains. C'est Mimi Mathy qui vient chanter faux mais on la pardonne parce qu'elle est quand même célèbre pour une naine et que c'est pour la bonne cause. C'est Bataille et Fontaine qui viennent adopter un petit myopathe orphelin en direct sur le plateau. C'est Nagui qui exhorte les revenus médians et les salaires merdiques à cracher aussi un peu au bassinet. C'est Julien Courbet qui propose aux interdits bancaires de payer en plusieurs chèques. Et ça finit par Florent Pagny qui vient donner l'exemple malgré tous les problèmes financiers qu'on lui connaît à cause de sa liberté de penser qu'il paye trop d'impôts.

Le téléthon, c'est comme les pièces jaunes, ça sert à rien. L'hôpital se fout de la charité.

mercredi 6 décembre 2006

Marcof, paparazzi psychanalyste

Il paraît que tous les militants du M.T.P.T.P.C.A.C.P le jalousent à fond. Pardon pour ceux qui ne connaissent pas, le M.T.P.T.P.C.A.C.P, c'est le Mouvement du Transfert Psychanalytique Télévisé Pour la Croissance de l'Audimat des Chaînes Publiques.

C'est vrai que le jour où il demandé à Charlotte Gainsbourg -en direct- , si le clip de Lemon Incest s'apparentait pas un peu quelque part à une espèce de viol télégénique, il a failli pousser Mireille Dumas et Henri Chapier à la retraite. Il croit que tous les téléspectateurs sont comme lui, Marcof : des chirurgiens de l'infiniment intime à l'intérieur de la star. Il faut tout déballer sinon c'est pas du jeu. C'est de la triche quand c'est pas transparent, une star. C'est pas pour le voyeurisme, hein, pas du tout, c'est pour leur faire du bien, aux stars. Marcof, il avait pris option psychologie de night club dans son BEP chanteur karaoké. Et il a bien retenu la leçon : la souffrance il faut la ver-ba-li-ser. En direct, en articulant et sans se gourer de caméra. Sur le plateau d'on a du flair pour la face cachée de tout le monde, il avait tout fait tout bien pour les mettre à l'aise, ses patients. . . Ariane pour la figure de la mère rassurante, Guy Carlier comme métaphore du divan, et Marcof, à l'écoute, l'oreillette aiguisée et la bouche en cul de ballon baudruche. Et ça marche : Renaud ne boit plus entre les repas et Doc Gynéco a trouvé un maître à penser. D'ailleurs, ça marche tellement bien que M6 s'est offert Marcof cet été. Et ça, c'est une grosse perte pour le M.T.P.T.P.C.A.C.P.

mardi 5 décembre 2006

Carambar light

C'est un fin rigolo-riage
Pour la blague il est-ourdissant
Vraiment pas du tout manchot-phage
Vraiment très calembour-soufflant
Boby Lapointe - d'ironie
N'est qu'un débutant-pis pour lui
Si ça laisse Ray Devos-sceptique
C'est Ruquier-le plus drolatique
Ses fiers chroniqueurs-de belles mères
Se forcent à rire-asciblement
Caca Pipi Zizi-blement
Ils lui montrent leurs dents- tellières
Le beau Stevie- dedans son crâne
Christine bravache- du troupeau
Isabelle Alonso- de Vincennes
Gerard - ment vu un intello
Non, on est pas couché- ces cons
Sont des somnifères - à repasser
Censés nous fatiguer-lurons
Toutes nos neurones - aux maths aux pets

lundi 4 décembre 2006

Un chercheur indubitable

Ce génie a déjà généreusement légué son corps à la science. Il lui faudra des millénaires, à la science, pour comprendre l'impeccable quadrillage neurologique qui se déploie là-dessous. C'est peut être le premier homo sapiens sapiens sapiens, Claude Allègre. Au moins, c'est vraiment un ambassadeur de l'encyclopédisme à la française. Il connaît l'univers comme sa poche. Dans l'histoire des sciences, il y a Léonard de Vinci, et puis lui. Modeste partisan de la démocratisation de ses savoirs, il condescend chaque semaine à vulgariser pour ses disciples une ou deux rubriques de son omniscience.
Il ne lit pas les "que sais-je", il écrit tout ce qu'il sait déjà. Entre deux dégraissages de mammouth, il dialogue avec Dieu et la Science, révolutionne la climatologie et repousse quotidiennement les limites de l'interdisciplinarité. Il publie trois pavés par an. Si tu veux avoir une chance d'effleurer son oeuvre intégrale, tu dois lire Allègre tôt. Son activité est telle que les francs maçons se demandent sérieusement s'il n'a pas une demie douzaine de clones. En guise d'étirement cérébral, il a même publié une compilation de ses meilleures blagues : quand on sait tout, on ne prévoit rien. Il a réalisé un miracle dans ma propre vie. Alors que j'ai calé sur les sciences dures en seconde grâce à une prof de math alcoolique et une chimiste imbibée d'anti-dépresseurs, Allègre m'a offert à l'aube une hypothèse fulgurante : et si l'univers tournait finalement autour de son nombril?

Un phraseur intarissable

Alors là, si tu te prends pour un artiste, dégage. Tu nous envahis, avec tes millions de cartes postales bidons. C'est nul, ce que tu fais. Je préfère encore les bons vieux calembours premier degré, les proverbes galvaudés, les recettes locales, c'est dix fois plus marrant. Tu nous ennuies avec ton écriture pseudo-enfantine, tes aphorismes de café du commerce et tes gros clins d'oeil appuyés. Pourquoi t'es partout? Pourquoi tu nous a barbouillé tous les tableaux noirs avec ton tipex dégoulinant? T'es même pas drôle, même pas fin, même pas provocant, même pas original. Tu nous gonfles, à la fin. Ton seul talent, c'est d'avoir inondé le marché de la papeterie avec tes platitudes. Pour ça, parole, tu es extrêmement doué. Médite momentanément le motto de mon ami Malek : "si ce que tu as à dire n'est pas plus beau que le silence, ferme ta bouche"
Il y a trop de faux artistes.

Edouard L., vendeur militant

Faut chercher à le comprendre, Edouard. Déjà, il a eu une enfance difficile, au cœur des médiocres 30 glorieuses où l’on croyait que le bien-être reposait sur le patrimoine électroménager. Issu d’une humble famille de marchands bretons, il est tombé dans le baril de promotion magique quand il était petit. A sept ans, on lui offrit une calculatrice et des autocollants. Le dimanche, son pater l’emmenait détrousser les cultivateurs d’artichauts et les crêpiers. A douze, il collectionnait les catalogues et les boîtes de conserve. Il n’a pas eu le temps d’avoir une adolescence, Edouard. En mai 68, il vendait des posters, rue Soufflot.

C’est ça, le déterminisme social, cette grande machine froide qui nous replace implacablement dans une catégorie proche de celles de nos parents. Seul un déclic, un heureux accident de la vie, une rencontre fortuite, un pur hasard, un court circuit anthropologique peut nous libérer de notre rôle imposé. Pour Edouard, ça s’est passé un soir d’Avril. Il venait de terminer l’inauguration de l’hyper de Courteville quand il trébucha sur une gondole du rayon lecture et bricolage. Les Héritiers de Bourdieu et une lampe de poche apparurent comme par magie. Il embarqua la torche et l’exemplaire, qu'il dévora dans la nuit. Le lendemain matin, il sentit gronder en lui une immense révolte et décida de tout plaquer pour devenir un poète engagé :

« Il est interdit d’interdire de vendre moins cher »
« Sous les pavés de saumon, deux sardines panées »

« Soyez impossibles, demandez des prix réalistes »
« Le pouvoir d’achat est au bout du crédit »

Bah quoi ?

dimanche 3 décembre 2006

Rira bien qui rira le dernier

Si ça se trouve, c’est de l’avant-garde. Il a atteint le treizième degré. Dieudonné a déclenché l’œuvre de sa vie sans prévenir personne que le spectacle a commencé. C’est une reconfiguration de l’humoristique qui marquera peut être un tournant définitif dans l’histoire du drolatique. Si ça se trouve, ça va super loin dans le tordant. C’est un sketch de longue haleine, une caméra cachée permanente, où l’artiste a dix ans d’avance sur son public.

C’est un retournement total de la relation du comique à son public : le clown se marre sur scène tandis que les spectateurs se grattent la tête, ces cons là, avec leur humour de retard. Tu comprends ? C’est le rire du futur. Du thriller comique tendu par un système de vannes à retardement. C’est un peu compliqué sur le moment, mais il paraît qu’à la fin, on va se payer une sacrée tranche de fou rire. La rigolade en différé, c’est simple mais fallait y penser.

Oui-Oui le requin

Ce môme là n’a rien d’un gentil pantin. Nos enfants sont ses marionnettes. Il s’infiltre partout : c’est le numéro un des produits dérivés. Un preneur d’otages en couches. T’en veux ou pas, t’en auras, des peluches, des sacs à dos, des posters, des housses de couette, des bonbons et des brosses à dents, des DVD, des jeux vidéo, des parapluies, des pare-soleil, des bonnets, des chaussons et des chaussettes, des ballons, des seaux de plage, des biberons, des taille-crayon, des baudruches, des fromages en portion, des élastiques à cheveux et des livres on ne peut plus cons. C’est quand tes gamins seront en math sup qu’ils pourront calculer son chiffre d’affaire, mais il sera déjà trop tard. En plus, il veut leur faire croire que les trésors se trouvent au pied des arcs-en-ciel.
Oui-Oui avec son beau taxi, il te facture une douzaine de bagages même si t’as les mains vides. Il initie nos marmailles à la toxicomanie infantile. Ma fille est tombée dans le panneau à dix-huit mois. Il a suffi d’un dessin animé. Depuis c’est la spirale infernale. Elle est partie en sucette avec l’affreux aux joues roses. Sa mère et moi, on n'a pas vu le piège. On croyait Jeanne bien au dessus de tout ça. On a essayé de détourner son attention avec Mimi la souris, Kirikou, le Roi et l’Oiseau, les Schtroumpfs, Tom Sawyer et le Baron de Munchäusen. Ça marche un temps. Mais dès que le gourou milliardaire réapparaît, plus rien n’y fait.
A la maison, plus personne ne peut regarder la télé peinard. Elle nous fout la honte dans tous les magasins. Elle est même impliquée dans des histoires de racket à la halte-garderie. Je sens que tout cela va mal finir. Genre chez Jean-Luc Delarue

vendredi 1 décembre 2006

Une bonne bavure


Des mecs qui se regroupent une ou deux fois par semaine autour d’un clébard bleu blanc rouge, forcément, ça finit mal. Même quand Cabu caricature Le Pen, il va pas aussi loin dans la recherche de mocheté. Non mais franchement, Dracula déguisé en Droopy avec de l’hémoglobine sous la canine, c’est pas vraiment sportif. Comment veux-tu qu’on emmène nos mômes au stade avec tous ces gros pleins de bière ? Paris est magique, qu’ils disent. En fait, c’est à cause de leurs sales gueules que les joueurs du PSG restent coincés. Tu peux pas courir vite et serrer les fesses en même temps. Au Parc des Princes, même le ballon, il a peur.
Alors franchement, qu’un flic guadeloupéen en ait eu la gâchette facile, ça va pas faire pleurer dans ma chaumière. Pour une fois qu’un noir est du bon côté de la bavure.
Quand j’étais petit, j’aimais bien le Paris Saint Germain. Mon père m’emmenait parfois au Parc. J’adorais Safet Susic et Mustapha Dahleb. Et puis un jour, à deux pas de moi, dans la tribune, j’ai vu un vieux monsieur, très noir et très élégant, avec un parapluie couvert de crachats. J’ai levé la tête et j’ai vu les rasés, deux étages au dessus, en train de se racler l’arrière gorge et de le bombarder de mollards. J’ai tellement été choqué que je m’en souviens encore aujourd’hui. Il devina mon malaise et me regarda avec un sourire. J’en avais déduit que ce monsieur apportait son parapluie tous les samedis pour se protéger des morves de ces fumiers. Depuis ce jour, pour moi, c’est tout sauf PSG. Je suis supporter du reste du monde.

Rupture tranquille




Moi aussi, j’aime bien l’oxymore. Une petite seconde d’éternité de Prévert dans un jour noir à la Baudelaire. Ces beaux collages faussement naïfs qui réconcilient les contraires. Et puis voilà que Sarkozy s’y met. La rupture tranquille. Au début, j’ai cru que c’était une blague. Un titre du canard enchaîné. De l’ironie de journaliste pour moquer la nouvelle posture du nain surpuissant. Il ne pouvait pas avoir dit ça pour de vrai.

Bah oui, moi, on m’avait dit qu’au niveau com’, cabinet, image, messages subliminaux, impact médiatique, hypnose et tout et tout, Sarkozy était blindé. Que ses conseillers auraient pu faire avaler une capote nervurée à Jean Paul II. Qu’ils lisaient dans les sondages comme Champollion dans les hiéroglyphes. Que dans sa bande, on inventait chaque jour les mots de la France qui bouge.
Je vérifiai sans tarder que non seulement il l’avait dit lui même, rupture tranquille, avec le ton et tout, mais qu’en plus il le répétait à qui mieux mieux. Qu’il en ferait même son slogan de campagne. Mort de rire, je me suis dit, enfin, ça y est, Sarko il a craqué…

Franchement, la rupture tranquille, dans la bouche de Bayrou, ça m’aurait pas plus étonné depuis le coup de l’extrême centre. Mais venant de Sarkozy, je me suis demandé à quoi ressemblait cette nouvelle paire de sabots.

Autant vous dire qu' hier soir, j’ai pas hésité une seconde entre «incroyable talent» et «à vous de juger». J’ai choisi le film comique. Trop bon le nouveau sketch du ministre de l’intérieur. Quelque part entre De Funès dans la gestuelle et Desproges dans le texte. Je cite de mémoire : « pour que tout redevienne possible pour tout le monde » ; « pour aider la France qui se lève tôt, qui travaille dur plutôt que la France qui se plaint toujours, pour pas grand-chose » ; «l’ordre en mouvement»…
Des vannes terribles. Moi et la France qui se couche tard, on s’est vraiment bien marré. A six mois de la présidentielle, mine de rien, le chef de l’ump a troqué son kärcher contre un brumisateur : la rupture tranquille.
Quel gros malin.