vendredi 15 décembre 2006

Quelque chose à nous en Helvétie

Quand il a entamé des démarches afin d'obtenir la nationalité aux services de l'Etat civil de la municipalité de Saint Barthélémy, la secrétaire lui a demandé en rigolant : "vous êtes Belge ou quoi ?". Alors Johnny H. s'est mis à réfléchir. Son père l'était, Belge, c'est vrai, alors pourquoi pas lui ? Johnny H. est exténué par l'impôt soviétique qui ponctionne injustement les moyennes fortunes de France. Avec l'euro, son coach de stretching dermatologique a doublé ses tarifs. Il faut se payer des mois d'avocat dès qu'on rigole un peu avec une petite sur le yacht. Pas moyen d'importer non plus des plombiers polonais pour terminer sa villa à Saint Barth. Et puis tous ces salauds de pauvres qui le téléchargent gratis. Le stade de France est trop petit pour amortir les frais de maquilleuses et de pédicures.
La nationalité belge, ça n'a pas marché non plus. Avec le temps, il y a prescription. C'est Nicolas S. qui l'a finalement convaincu quand il a dit que la France si on l'aime on y reste et sinon on la quitte. Et bien, il ne l'aime plus, ce pays où l'on sous-tire l'argent aux anciens cons co-belges pour le donner aux franco-congolais. Il aurait bien rejoint Florent P. en Argentine, parce que le nom du pays est accueillant et qu'il pourrait faire escale à Saint Barth afin de résoudre enfin cette obscure affaire de nationalité. Mais cet été, alors que Johnny s'apprêtait à échanger son sang contre l'hémoglobine détaxée d'un jeune Sénégalais pétant de santé, il croisa Yannick N. dans la salle d'attente. Yannick lui confia ses problèmes de jeune retraité du Tennis et lui indiqua avec des dents longues comme le bonheur que l'espérance de fric des nouveaux Suisses dépassait d'une douzaine d'années monétaires celle des habitants de l'Europe trotskiste. Alors Johnny décida en bloc d'y installer ses lingots. Comme dirait Patrick D., ce sont toujours les meilleurs qui s'en vont.

jeudi 14 décembre 2006

Une malchance pour l'égalité

Azouz B., à le voir sourire comme ça, il est bon comme dans ses romans et vraiment c'est un modèle d'intégration de la République méritocratique. Il fait partie des gentils, au gouvernement, avec Jean Louis B. C'est tout à fait un truc à la Chirac, ça : les synthèses entre la droite réactionnaire et les nihilistes arrivistes, libéraux quand même. Azouz, c'est pour montrer que la gauche n'a pas le monopole du coeur. Alors il est sous-ministre à l'égalité des chances. Sous-ministre, parce qu' il faut y aller doucement avec l'aile droite de la synthèse. A l'égalité, mais des chances seulement, pour la même raison. Son chef, Jean Louis B., il dit que la cohésion sociale, c'est son boulot. Lui aussi, il est de la droite gentille. Un qui remonte les manches pour les pauvres, comme Azouz B.
Alors bon, c'est vrai que leur problème à eux, c'est qu'on les entend peu. L'autre problème, c'est que les rares fois où on les entend, on ne les comprend pas. Mais c'est souvent comme ça, les médiateurs. Le plus drôle, c'est quand on leur fait commenter les prises de position de Nicolas S. Nicolas S., ça se voit qu'il n'aime pas tous les pauvres, quand même. Les seuls pauvres qu'il aime, c'est ceux qui ne le restent pas. Ceux qui courent sur l'escalator social avec une inextinguible soif de réussite. Jean Louis B., lui, il doit construire de nouveaux poulaillers urbains pour la moitié de tous les pauvres et Azouz B., il anime la star academy de l'insertion diversifiée. Normalement, ils préparent le bilan social de Chirac II. Alors, quand ils se font filmer les manches remontées sur le terrain, il ne faudrait pas que Nicolas S. leur pourrisse l'ambiance à l'avance, soyons logiques. Et pourtant, le gros sabot de la place Beauvau ne cesse de mettre la zizanie dans leur délicate entreprise. Il a même été jusqu'à inventer une espèce de téléréalité policière de proximité, rediffusée régulièrement dans le droit de t'avoir, pour ruiner toutes leurs tentatives. Les pieds dans le plat de la cohésion sociale, la petite brute fait de la destruction-reconstruction d'adolescents, de jeunes flics et de pompiers des banlieues pour foutre le feu à l'opération de ravalement urbain. Si bien que personne ne parle d'Azouz B. et de Jean Louis B. Même moi, je ne sais pas trop quoi en dire.

Laurent B., caillasseur d'ambulances

Je ne sais pas si vous avez remarqué, mais ils ont bouleversé tous les programmes cet été. Ils ont fait le coup lâchement, au mois d'août, pendant qu'on bronzait avec nos sudokus. Comme les députés, en traîtres. On a le dos tourné au soleil, et vlan, ils nous suppriment l'impertinence des grilles hebdomadaires, discrètement, pour éviter les manifs de téléspectateurs.
Par exemple, moi, tout le monde s'en gave, c'était ma petite bouffée d'insolence dans ce PAF formaté. Laurent B., il était trop fort. J'adore comme il vanne. Trop puissant, l'amuseur, rien ne pouvait l'arrêter dans son délire. Même Thierry A., le présentateur de l'émission, il ne pouvait pas s'empêcher de pouffer. Une fois, il y avait Elisa Yapjörg, une top model danoise qui parlait pas bien le français mais qui présentait un décolleté ouvert sur des seins bombés. Carrément, laurent B., il lui a sorti : "j'irai bien faire un tour dans ta silicone vallée". T'as vu comment il gaze Gaffie ? Moi, ça me rappelait mon pote Jérôme quand on avait fait le voyage linguistique en Allemagne. Il parlait aux Allemands avec une voix toute douce et en fait il les insultait. Mais en français, tu vois, comme ça, ils comprenaient pas, les boches. J'adore ce genre d'humour, tu sais, quand le comique prend des risques.
Bref, nous étions morts de rire, Thierry et moi, et comme ce soir là, j'avais rien sous la main pour enregistrer, Thierry a promis qu'il la repasserait au best of la semaine suivante. C'était vraiment bien organisé, au niveau de l'impertinence, cette émission. Laurent B., c'est un comique qui nous rappelle que le rire a une fonction politique dans la société, tu vois. Par exemple, quand Thierry invitait une femme politique, Laurent il y allait à fond. Carrément, déjà, il tutoyait Christine Boutin. Genre : "t'as pas un morceau de shit à dépanner, Christine?". Alors là, t'imagines le malaise... et la quinte de rire pour Thierry et moi. En plus, ce que j'aimais bien, chez lui, c'est que quand même, il avait des limites. Par exemple, quand il y avait Joey Star ou Bernard Tapie sur le plateau, Gaffie il savait faire preuve de retenue parce qu'il savait qu' ils avaient des problèmes avec la justice. Alors il ne voulait pas en rajouter, tout simplement. J'aime bien les humoristes élégants, moi. En revanche, il était impitoyable avec les amuseurs ratés. Qu'est ce qu'ils ont pris, Michel Leeb et Laurent Gerra, avec lui!
Et puis il maniait le second degré, Laurent B., avec brio, en plus. Il a fait un film, les clefs de bagnole, j'ai même pas eu besoin d'aller le voir tellement l'affiche, rien que ça, ça m'a fait rire. En fait, dans le sous titre, carrément, il avait fait écrire "n'y allez pas, c'est une merde". Enorme. Je me suis dit, c'est pas possible, déjà l'affiche elle m'explose à gorge déployée, alors si je vais le voir, je risque l'arrêt cardiaque. Tu vois, c'est à ça que je reconnais les grands humoristes : ils sont capables de pratiquer l'auto-dérision. Son film, je l'achèterai en DVD. Pour le regarder à petites doses.

mardi 12 décembre 2006

Je suis devenu un vieux jeune

"Virgin mobile, soyez enfin détendu du mobile"
Moi, quand je vois des publicités comme celle là, c'est le coup de vieux. Je me remets en question. Un profond sentiment de ringardise m'envahit. La cruelle prise de conscience que je suis tendu, que dis-je, carrément coincé du mobile. Qu'en pense Laury? Cela fait au moins 10 ans que nous faisons l'amour sans SMS. La honte pour moi. Je n'y ai même pas pensé. Pire : je ne lui ai jamais proposée d'inviter une copine qui soit chez Orange, comme nous. Je suis vraiment bidon. On pourrait s'envoyer des SMS coquins tous les trois sur une couverture poilue, nous aussi. Après, je me dis que physiquement, il faut assumer. Pour atteindre Doc G., il faut bosser plusieurs mois, sans relâche : macdo au petit déjeuner, KFC à midi, dîner chez Quick. Se laver les dents à la sauce potatoe entre chaque repas. Et puis, je suis hanté par mes complexes de mobile. Le mien date de 2003. Le Paléolithique. A l'époque, il fallait de gros téléphones pour que les ondes archaïques traversent les murs de la grotte. Il faudra que je parle de tout cela à ma sexologue.
Fasciné par le spot, j'ai fait des recherches sur le réalisateur génial de cette pub et alors là, je cite, parce que sinon, vous ne voudrez jamais me croire : «Nous recherchions une personnalité capable d’illustrer notre positionnement «Détendu du mobile» : Virgin Mobile est une marque pleine d’humour, sans a priori. Nous tenions par ailleurs à inscrire cette publicité et cette personnalité dans un univers fun et glamour, correspondant au territoire d’expression de notre marque» explique Julien Allisy, Directeur Marketing et Communication de Virgin Mobile. Les spots publicitaires, tournés par Eric Toledano et Olivier Nakache, mettent en scène 2 scenari où Doc Gynéco – qui signe ici sa première apparition dans une publicité – communique sans limite par SMS avec ses deux superbes masseuses pour leur donner ses instructions : second degré, humour, impertinence sont au rendez-vous !
Alors là, j'ai senti la pression. Déjà, je sais même pas ce que ça veut dire, moi, "territoire d'expression". Et puis je suis incapable de déceler l'humour, l'impertinence et le second degré. La honte sur moi. J'ai bêtement cru que c'était un truc sexiste classique, moi, le massage détendu du mobile, genre la playmate de collarococoricocoboy pour les jeunes d'aujourd'hui. Et là j'apprends que ça va beaucoup plus loin que ce que j'avais perçu. Et je reprends une nouvelle claque au niveau du décalage générationnel.
Le constat est sévère : à 33 ans, j'arrive même plus à saisir l'impertinence et le second degré dans l'univers fun et glamour des publicitaires adophiles.